Patrick Potier n’a pas attendu que l’Ukraine tombe sous le feu des projecteurs pour connaitre ce pays, dans lequel il s’était déjà rendu à plusieurs reprises. Les relations qu’il a nouées sur place lui permettent de livrer un témoignage, comme s’il était vécu de l’intérieur, sur cette guerre qui a été déclenchée au cœur de l’Europe.
Son dernier roman, Un hiver en Ukraine, paru aux éditions Lazare et Capucine, rend un hommage justifié à l’Ukraine, à ses habitants et à leur héroïque résistance. Ce livre, très agréable à lire, devrait intéresser quiconque se sentirait un tant soit peu interpelé par cette tragédie qui se déroule presque sous nos yeux.
L’ouvrage s’ouvre sur une préface d’Aya Manafova, une jeune femme habitant à Kiev, qui nous livre son ressenti face à ce drame vécu en direct et aux bouleversements qu’il a provoqués, du jour au lendemain, dans l’existence quotidienne ; elle fait part du sentiment de la précarité de la vie que suscitent les bombardements, mais aussi des liens de solidarité qui se tissent dans cette épreuve collective, de la volonté de lutter qui domine dans la population, et de l’espoir qui persiste.
Comme une sorte de clin d’œil, Patrick Potier donne le même prénom d’Aya à la principale héroïne de son roman, une jeune ukrainienne courageuse qui se retrouve à vivre une situation identique ; elle habite elle aussi à Kiev, et tente de survivre affrontant les mêmes épreuves. Un Français, envouté par son charme, est tombé amoureux d’elle depuis longtemps, mais ses projets, après avoir été enrayés une première fois par le Covid, vont être contrariés, plus sérieusement encore, par la guerre qui empêchera à nouveau les deux amants de se rejoindre. Depuis Paris, où il se voit condamné à vivre le conflit à distance, il s’efforce d’aider son aimée du mieux qu’il peut, car cette jeune femme à la fois fière et sensible, bien que bouleversée par la situation, ne peut se résoudre à quitter son pays en laissant son père.
Cette guerre cruelle est également montrée, en parallèle, sous le regard d’autres personnages directement confrontés à cette tragédie. On y suit notamment un officier russe commandant une unité de chars, dont la vision évolue au fil des combats, de ses rapports avec ses supérieurs et de ses conversations téléphoniques avec son épouse anxieuse à juste titre. Parmi les personnes impliquées par ce conflit, on voit également des parents angoissés de perdre leur enfant, un médecin prêt à marcher dix kilomètres dans la neige pour sauver un bébé, et bien d’autres gens confrontés à des drames et à la mort…
Les émotions et les ressentis que provoque une guerre sont toujours difficiles à restituer avec des mots. Il a fallu le talent d’un auteur à la fois réceptif et créatif, comme l’est Patrick Potier, pour réussir à leur donner corps à travers ce récit romanesque qui, bien qu’étant une fiction, aboutit à exprimer avec véracité la souffrance bien réelle d’une population, mais aussi sa volonté de résister et de tenir bon jusqu’à la victoire.