Dans toutes les disciplines scientifiques transparait une question essentielle, un problème fondamental, qui se pose sous l’aspect d’un dilemme entre deux notions de base, entre deux principes essentiels. Dans chacune de leurs disciplines, les chercheurs, qu’ils en aient conscience ou non, se heurtent à une alternative de cet ordre.
En mathématiques, le problème fondamental se situe autour des notions de continu et de discontinu ; la démarche s’efforce en général de cerner le qualitatif, qu’est le continu, au moyen du quantitatif que représente le discontinu.
En physique et en chimie, la question qui mobilise les spéculations concerne la dualité entre la matière et l’énergie, la physique mettant l’accent davantage sur l’énergie, et la chimie davantage sur la matière. On recherche toujours LA théorie qui permettrait d’unifier non seulement toutes les énergies, mais aussi la matière et l’énergie, que la théorie considère déjà comme deux modes de manifestation d’une même réalité.
En biologie, la question de fond réside dans le rapport entre le vivant et l’inerte. La démarche actuelle tente de ramener le phénomène de la vie aux réactions de la matière inerte, supposées être mieux connues, tandis que la notion de vivant est de celles qui échappent à l’intellect.
Dans les sciences humaines, toutes les discussions tournent autour d’une même alternative : celle entre liberté et nécessité, qui prend différents aspects :
- le droit oppose implicitement les libertés individuelles et civiques à la puissance publique ;
- l’économie doit trancher entre les parts respectives du libéralisme et du dirigisme ;
- les écoles de psychologie et de philosophie se partagent entre la primauté du libre arbitre et celle du déterminisme ;
- les sciences politiques et sociales déclinent toutes l’interrogation entre la liberté individuelle et la contrainte du collectif, entre démocratie et autoritarisme.
La question, commune à toutes les sciences humaines, se résume à cette opposition entre liberté et nécessité, que Fabre d’Olivet théorisera, sous une forme propre, dans la distinction qu’il établit entre ce qu’il appelle la Volonté humaine et le Destin.